Montans et le vin
Amphores ayant contenues du vin de Gaillac
Le vignoble Gaillacois
Il est l'un des plus vieux vignobles français. Ses origines remontent très probablement à avant l'occupation romaine. Des vestiges de vinaire poterie datant du 2 èmè siècle avant notre ère ont été découverts à Montans, sur la rive gauche du Tarn. Ceci semble attester d'une activité . viticole très ancienne puisque c'est à cette époque que le Tarn devient navigable avant de rejoindre la Gironde . La présence du Tarn favorise le transport, via la Garonne, vers Burdigala et l'océan atlantique à une époque où le vignoble de bordeaux n'existait pas encore.
La viticulture du Tarn
La viticulture du Tarn reposait alors probablement sur des cépages locaux, peut-être originaires de la forêt domaniale de la Grésigne, mais aussi sur des cépages romains. (ainsi que du croisement entre cépages romains et locaux) Si Robert Plageoles attribue l'origine du Mauzac au basilicae romain, Guy Lavignac évoque comme possible ancêtre du duras le duracina, cépage introduit par les Romains. C'est aussi l'opinion de Marcel Lachiver qui constate que des cépages originaux comme l'ondenc, le braucol (ou fer-servadoux), l'en-de-l'ehl, le duras (déjà connu par Caton sous le nom de duracina), plaident en faveur d'une grande antériorité de ce vignoble situé à l'extrémité ouest de la Narbonnaise.L'arrêt de Domitien en 92, obligeant à l'arrachage de 50 % du vignoble gaulois, touche le vignoble de Montans avant que Caracallaen213, puis Probus en 276 et 282 ne libéralisent la culture de la vigne
Moyen Âge
Suite à la chute de l'empire romain, la ville de Gaillac est détruite, les campagnes sont dépeuplées par les expéditions de capture d'esclaves, la forêt regagne du terrain et les cultures deviennent essentiellement vivrières.
Chute de l'Empire romainLe commerce lointain est contrecarré par les expéditions de pillage des Vikings, (qui remonte les cours d'eau) et des musulmans (installés en Espagne et en Septimanie). La navigation n'est plus sûre, chacun consomme le vin local : les vins réputés deviennent des vins de table.
Refondation officielle de la ville de Gaillac
La refondation de Gaillac, pour doter la nouvelle abbaye Saint Michel de Gaillac de moyens de subsistance.
Cette date marque également la fondation officielle de la ville de Gaillac, bien que le nom existât déjà. En effet, en 654, saint Didier, évèque de Cahors , lègue par testament écrit plusieurs villas dont il était propriétaire. L'une d'elle était Gailhac, orthographe médiévale du Gaillac d'aujourd'hui. Une ville s'érige peu à peu autour de ce monastère bénédictin sur la rive droite du Tarn. L'abbaye organise alors également la production viticole et la sélection des cépages locaux commence. Un vignoble est aussi créé autour d'Albi, sur le domaine épiscopal. Une partie de ce dernier est incluse dans l'actuelle AOC Gaillac.
L'époque des comtes de Toulouse
Gaillac, sur la rive droite du Tarn, fait partie des domaines du conte de Toulouse. La rive gauche appartient aux Trencavel, vicontes d'Albi. Le vignoble d'Albi appartenait à l'évéque d'Albi.
Cette terre Languedocienne est dominée par une chevalerie raffinée qui aime la gastronomie et le bon vin. Le vin de Gaillac se trouve sur les meilleures tables. Au XIIIe siècle, Raymond VII, Conte de Toulouse, édite l'un des premiers décrets, ancêtre de nos actuels décrets d'appellation d'origine contrôlée, ce qui dénote la volonté de produire un vin de qualité. La fumure des vignes est prohibée, à l'exception de celle venant des pigeons. Ce fumier nommé « colombine » est à l'origine du grand nombre de pigeonniers dans cette région du Tarn.
« Ces fumiers sont les meilleurs pour la qualité et la quantité du vin, presque tous les autres ne faisant qu'empirer son goût surtout les puants et les pourris. Au point que vous vous abstiendrez. Telle considération a tant et si bien œuvré à Gaillac que par décret public, le fumier dans la vigne y est défendu, n'étant permis, même au particulier, de fumer sa propre vigne de peur de ravaler la réputation de leur vin blanc »
— Oliviers De Serres en 1600 À partir de 1209, la croisades des Albigeois, met un terme brutal à ce mode de vie. Si Albi est épargnée en rendant hommage à Simon IV de Monfort, le vignoble de Gaillac est ravagé lors de la chevauchée des croisés de 1212 qui les mène de l'Albigeois vers le Quercy et l'Agenais. En effet, l'ost, pratiquant la politique de la terre brûlée, arrache vignes et vergers, piétine ou incendie les blés et détruit les villages.
Les vins du Haut pays
Blason de Gaillac sur lequel figure le même coq que celui qui était marqué au fer sur les barriques.
Avec la paix revenue la vigne est replantée
La paix revenue, la vigne est replantée et le commerce reprend ses droits. Les consuls de Gaillac et Rabastens établissent en1221, une charte de respect des bonnes pratiques viticoles allant de la ban des vandanges. Les vins du Tarn produits durant cette période servent, non seulement à la consommation locale mais aussi à l'exportation. Celle-ci s'effectue par voie d'eau sur des gabarres, sorte de barque à fond plat, suivant le Tarn puis la Garonne jusqu'à Bordeaux d'où les vins sont envoyés dans le nord de l'Europe, en France du nord, en Angleterre ou encore aux Pays Bas : en 1253, Richard III dAngleterre se fait envoyer 20 barriques du vin de Gaillac. ternte ans plus tard, l'Angleterre importe toujours des vins provenant tant de Gaillac que de Lisle sur Tarn ou Rabastens Au début du XIV siècle, la réputation des vins du Gaillacois est assurée. Il fournit, entre 1306 et 1307, années pour lesquelles les comptes ont été conservés, 40 % des vins qui transitent par le bassin de la garonne vers Bordeaux pour être exportés. Henri IV fut aussi grand amateur de vin de Gaillac. C'est le début de l'époque des « vins du coq », marque au fer apposée sur les fûts qui quittent la ville de Gaillac, mais également de la domination sans partage des jurats de Bordeaux, fixant les conditions de vente des vins du Haut Pays, obligés de passer par la Garonne.
« Comme tous les autres vins du Haut-Pays, ceux de Gaillac, selon toute vraisemblance, étaient souvent meilleurs et plus puissants que ceux produits autour de Bordeaux. C'est pourquoi les Bordelais les jalousaient et s'efforçaient de vendre en priorité leur propre production. »
— Hugh JOHNSON
Si nul ne connait la date de création du Gaillac mousseux, il est parfois suggéré qu'Auger GAILLARD(1530-1593) aie célébré « Lo bi qu'éro picant et sautabo dins lou veyre » le vin (supposé de Gaillac) qui pétillait et sautait dans le verre. D'aucuns y virent un mousseux déjà existant sur les tables que fréquentait le poète. En fait, la citation a été tronquée ; il parlait d'un vin Muscat .
Epoque moderne période faste du commerce
Vendanges au XIVe sièecle
Procedé de fabrication de vin pétillants
Il semble également que la région connaissait un procédé de fabrication de vins pétillants avant la mise au point du champagne par Don Pérignon, qui n'a probablement pas inventé le concept mais l'a perfectionné à la fin du XVIIe siècle. Déjà, à cette époque, le Gaillac mousseux acquiert une réputation de bon aloi. Et un auteur comme Guillaume CASTEL, dans ses Mémoires du Languedoc, parus en1633, note que « Le vin de Gaillac est très apprécié des princes étrangers, laissant dans la bouche un goût de rose ». Un marché local florissant est également développé, grâce à l'enrichissement de la région, venant de la culture du pastel. Les riches hôtels bâtis à Albi, Gaillac ou Toulouse, témoignent de l'enrichissement de la région. Il va de soi que les grandes maisons se faisaient un devoir de servir le meilleur vin à ses hôtes ; celui de Gaillac en faisait partie.
Hiver 1709. Le XVIIIe siècle démarre très mal pour les producteurs de gaillac. En 1708, après un hiver bon pour la vigne, une gelée tardive au mois de mai (saints de glace) détruit la récolte en bourgeon. En 1709, un hiver très froid arrive. La vague de froid en janvier détruit nombre d'arbres fruitiers mais épargne relativement la vigne protégée par une couche de neige. Un redoux la fait fondre, inondant les champs et vignes de plaine. Puis le retour du froid congèle cette gadoue. L'alternance de froid (-10 à -15°C) et de redoux dure trois mois. Début avril, le constat est dur, il n'y a pas de vin à vendre ; la récolte a été nulle et les vins stockés sont perdus en cave à cause du gel : les barriques ont éclaté. Il n'y a plus d'argent, pourtant il faut replanter, racheter des barriques...
Déclin du prestige des vins
Le prix des vins en 1710 , à cause de leur rareté va encourager les vignerons du Tarn à replanter. Cette reconstitution prend presque un caractère frénétique.
Les plantations ne se font pas toujours dans le sens de la qualité ; certains plantent des cépages gros producteurs pour alimenter le marché à bas prix des vins de grande consommation lié à l'afflux des ouvriers dans les grandes villes. En 1731, le gouvernement est contraint de geler les plantations nouvelles, le royaume commençant à sur-produire du vin au détriment du blé.
Le vin de Gaillac est encore vendu par les négociants bordelais mais il acquiert également le rôle de vin « médecin », dont le but est d'améliorer la qualité et la profondeur des vins bordelais, ainsi que leur faculté de conservation. Cependant, les vins de Gaillac y perdent la marque de leur origine, supprimée en 1751.
Époque contemporaine
A La Révolution Le domaine ecclésiastique de l'Abbaye Saint Michel de Gaillac, est vendu comme biens nationnal par les révolutionnaires suite au décret des biens du clergé mis à la disposition de la nation à partir de 1789 de nombreux paysans du Tarn achètent alors une petite parcelle, mais une partie tout aussi importante du vignoble échoit à quelques bourgeois et aristocrates qui constituent ou agrandissent leurs domaines. Les caves de l'abbaye situées au bord du Tarn sont reprises par des négociants. Elles servent au stockage du vin, en attendant la bonne période pour le départ des gabarres chargées de vin, car le Tarn n'est en effet pas navigable tout l'année.
En1792, les vignerons de Gaillac se voient interdire l'embauche de journaliers pour les vendanges tant que les moissons ne sont pas achevées. Le législateur veut protéger l'approvisionnement en blé de la jeune nation en guerre.
Une des contreparties des guerres de la Révolution puis du Premier Empire est l'ouverture des marchés avec la fin des barrières douanières intérieures. Le Blocus Continental pénalise le commerce lointain du vin. Les vignerons du Tarn vont donc se tourner vers les marchés locaux. Les premiers restaurants ouvrent, créés par les anciens cuisiniers des grandes maisons aristocratiques. La gastronomie et le bon vin se démocratisent. Une bourgeoisie qui s'enrichit vite à besoin de produits de consommation à la hauteur de ses moyens. Les ouvriers (mineurs de Carmaux, ouvriers d'Albi, de Toulouse) commencent à consommer du vin du Tarn. Même si leurs moyens sont réduits, cette catégorie socio-professionnelle en pleine expansion n'est pas négligée ; une partie du vignoble du Tarn commence à rechercher la production de masse à bas prix.
Le XIXe siècle
Dans les années 1860, le docteur Jules GUYOT visite le vignoble Tarnais. Il mentionne l'économie du vin dans le département. La vigne y occupe 38 000 hectares, soit un quinzième de la superficie du Tarn. Le rendement moyen est de 20 hectolitres par hectare et rapporte 15 millions de franc, soit le quart du revenu du Tarn. L'assemblage des vins rouges concerne fer Servadou, Prunelard et Negrette et celui des vins blancs, Mauzac, l'En de Lel et ondec. Les vins étaient différents de ceux proposés aujourd'hui. Entre autres, le Duras n'est qu'évoqué dans la longue liste des cépages cultivés, il est aujourd'hui indispensable. À l'époque, les cépages du languedoc étaient cultivés, mais Guyot déconseille leur usage en assemblage avec les cépages historiques. Il parle aussi du vignoble albigeois dont les vins récoltés avant maturité « étaient à faire sauter les chèvres de verdeur ». La vente se fait auprès des mineurs de Carmaux. Seul un noyau autour de Gaillac continue à pratiquer une viticulture de qualité.
À cette époque le vignoble du Tarn dépassait largement celui défini aujourd'hui par l'AOC. Sa surface était très importante, 31 000 ha en 1840; ainsi, en1850 la production de Gaillac représentait le double de la production bordelaise de 1995
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